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Note circulaire n° 733

relative aux dispositions fiscales de la loi de finances n° 50-22

pour l’année budgétaire 2023

Révision du mode d’imposition et de contrôle de l’impôt sur le revenu au titre des profits fonciers (IR/PF)

 

Avant l’entrée en vigueur de la LF 2023, les propriétaires, les usufruitiers et les redevables de l’IR/PF devaient, lors de la cession de biens immeubles ou de droits réels s’y rattachant, souscrire la déclaration des profits immobiliers dans les trente (30) jours qui suivent la date de la cession, en même temps que le versement spontané de l’impôt correspondant.

 

L’administration fiscale procédait au contrôle de la déclaration du contribuable par l’estimation du prix d’acquisition et/ou des dépenses d’investissements non justifiées ou de la valeur vénale des biens cédés, selon la procédure de rectification prévue à l’article 224 du CGI.

 

La LF 2023 a révisé ce dispositif en instituant un nouveau mode d’imposition en matière d’IR/PF et de contrôle à priori.

 

A- Demande d’avis préalable de l’administration en matière d’IR/PF

 

La LF 2023 a complété le CGI par un nouvel article 234 quinquies qui prévoit que les contribuables soumis à l’IR/PF peuvent demander à l’administration fiscale un avis préalable concernant les éléments de détermination du profit foncier net imposable et le montant de l’impôt correspondant ou, le cas échéant, concernant le droit au bénéfice de l’exonération dudit impôt.

 

Cette demande doit être souscrite, par voie électronique selon un modèle établi par l’administration, dans les trente (30) jours suivant la date du compromis de vente, accompagnée des pièces justificatives relatives à la détermination de l’impôt ou à l’exonération, notamment :

 

- le compromis de vente ;

- le contrat d’acquisition, l’inventaire après décès ou l’acte d’hérédité, le cas

échéant ;

- la copie de la carte nationale d’identité électronique (CNIE) du cédant ;

- les pièces justifiant les frais d’acquisition lorsqu’ils dépassent l’évaluation

forfaitaire de 15% du prix d’acquisition ;

- les pièces justifiant les frais de cession ;

- les pièces justifiant les frais financiers : tableau d’amortissement, attestation annuelle de paiement des intérêts ou tout autre document en tenant lieu ;

- les pièces justifiant les dépenses d’investissement : autorisation de construire, permis d’habiter, factures ou tout autre document en tenant lieu ;

- les pièces justifiant le lien de parenté en cas de cession à titre gratuit effectuée entre ascendants et descendants et entre époux, frères et sœurs ;

- l’ordonnance du juge des tutelles en cas de cession à titre gratuit effectuée entre la personne assurant la Kafala et l’enfant pris en charge.

 

Par ailleurs, le contribuable peut joindre à cette déclaration tout autre renseignement justifiant les spécificités de l’opération de cession envisagée, notamment la description détaillée du bien objet de la cession, sa situation, sa consistance, son état, sa finition et toute autre information.

 

NB :

 

Il y a lieu de rappeler que les co-indivisaires propriétaires d’un bien immeuble sont soumis à l’IR/PF à raison des parts détenues par chacun d’eux dans l’indivision et que chaque co-indivisaire est tenu de souscrire sa propre déclaration des profits immobiliers et de verser en même temps l’impôt y afférent.

 

A cet effet, chaque co-indivisaire peut demander à l’administration fiscale un avis préalable concernant les éléments de détermination du profit foncier net imposable correspondant à sa part dans l’indivision et le montant de l’impôt correspondant ou, le cas échéant, concernant le droit au bénéfice de l’exonération dudit impôt.

 

B- Réponse de l’administration

 

Suite au dépôt de la demande d’avis préalable, l’administration communique au demandeur son avis valant attestation de liquidation de l’impôt ou d’exonération, dans un délai de soixante (60) jours suivant la date de la réception de la demande précitée.

 

Cette attestation demeure valable pour une période de six (6) mois à partir de la date de la réponse de l’administration.

 

C- Déclaration des profits immobiliers et paiement de l’impôt

 

Après la réalisation de la cession, le contribuable doit souscrire la déclaration des profits immobiliers prévue à l’article 83 du CGI, dans les trente (30) jours qui suivent la date de la cession, et doit verser en même temps l’impôt dû, le cas échéant, conformément aux dispositions de l’article 173-I du CGI.

 

A cet effet deux cas de figure peuvent se présenter :

 

Cas n° 1 : Si le contribuable souscrit sa déclaration et procède, le cas échéant, au paiement de l’impôt sur la base des éléments de l’attestation de liquidation précitée, conformément aux dispositions des articles 83 et 173-I du CGI, il sera dispensé du contrôle fiscal en matière d’impôt sur le revenu au titre des profits fonciers prévu à l’article 224 du CGI.

 

Cas n° 2 : Les personnes n’ayant pas souscrit la déclaration sur la base des éléments de l’attestation de liquidation ainsi que les personnes n’ayant pas demandé l’avis préalable de l’administration fiscale, peuvent faire l’objet de la procédure de rectification prévue en matière de profits fonciers par l’article 224 précité.

 

L’article 173-I du CGI prévoit que ces personnes sont tenues de verser, à titre provisoire, auprès du receveur de l’administration fiscale la différence entre le montant de l’impôt déclaré et 5% du prix de cession.

 

Sont exclues du versement de ladite différence les personnes qui réalisent les opérations suivantes :

 

- les opérations exonérées visées à l’article 63 (II et III) du CGI, à savoir :

 

- les cessions d’immeubles dont la valeur totale n’excède pas cent quarante mille (140.000) dirhams;

- la cession d’immeuble ou partie d’immeuble destiné à l’habitation principale depuis au moins cinq (5) ans au jour de ladite cession ;

- les cessions de droits indivis d’immeubles agricoles, situés à l’extérieur des périmètres urbains entre cohéritiers ;

- la cession du logement social prévu à l’article 92-I-28° du CGI destiné par son propriétaire à son habitation principale depuis au moins quatre (4) ans au jour de ladite cession ;

- les cessions à titre gratuit :

 

- effectuées entre ascendants et descendants, entre époux, frères et sœurs ;

- effectuées entre la personne assurant la Kafala dans le cadre d’une ordonnance du juge des tutelles et l’enfant pris en charge ;

- portant sur les biens revenant aux associations reconnues d’utilité publique et inscrits au nom des personnes physiques.

 

- les opérations d’apport de biens immeubles et/ou des droits réels immobiliers à l’actif d’une société ou d’un OPCI, prévues aux articles 161 bis-II et 161 quinquies-B du CGI.

 

D- Rectification en matière d’IR/PF

 

La déclaration des profits immobiliers peut faire l’objet de rectification, conformément aux dispositions de l’article 224 du CGI, si elle n’a pas été établie sur la base des éléments de l’attestation de liquidation précitée ou si le contribuable n’a pas demandé l’avis préalable de l’administration fiscale.

 

E- Restitution du montant versé à titre provisoire

 

Le reliquat du montant versé à titre provisoire, visé à l’article 173-I du CGI, constituant la différence entre le montant de l’impôt déclaré et 5% du prix de cession, après déduction du montant de l’impôt supplémentaire émis suite à ladite procédure de rectification, est restitué d’office au contribuable concerné, conformément aux dispositions de l’article 241 bis-II-C dudit code.

 

Est également restitué d’office, le montant versé à titre provisoire précité, lorsque l’administration n’engage pas la procédure de rectification prévue à l’article 224 du CGI dans le délai imparti.

 

F- Obligation d’information

 

La LF 2023 a modifié et complété les dispositions de l’article 139-VI du CGI afin d’instituer l’obligation pour les notaires, les fonctionnaires exerçant des fonctions notariales, les adoul, les notaires hébraïques et toute personne ayant rédigé ou concouru à la rédaction d’un acte soumis à l’enregistrement, d’informer les contribuables concernés de ce nouveau dispositif, notamment de leurs obligations en matière de déclaration et de paiement, conformément aux articles 83 , 173-I et 234 quinquies du CGI.

 

A ce titre, l’attention du contribuable devra particulièrement être attirée sur la nature du montant de 5% du prix de cession susvisé versé qui ne constitue pas l’intégralité de l’impôt dû mais plutôt une avance sur impôt pouvant donner lieu à un complément ou bien à une restitution, le cas échéant.

 

De même, les personnes ayant rédigé ou concouru à la rédaction de l’acte doivent insister sur l’importance du choix de l’adresse élue par le cédant pour recevoir les correspondances de l’administration fiscale après la cession, qui devrait être portée sur la déclaration du contribuable et qui sera l’adresse de la notification éventuelle par l’administration et de ses effets juridiques.

 

Date d’effet :

 

Conformément à l’article 6-IV-25 de la LF 2023, les nouvelles dispositions précitées des articles 173-I , 224 , 241 bis-II-C et 234 quinquies du CGI, sont applicables aux opérations réalisées à compter du 1er juillet 2023.

 

Exemples d’illustration :

 

Exemple 1 : Contribuable ayant demandé l’avis préalable de l’administration fiscale en matière d’IR/PF

 

Un contribuable a conclu le 16 août 2023 un compromis de vente d’un appartement, acquis en 2020 et demande, à ce titre, l’avis préalable de l’administration fiscale en matière d’IR/PF tel que prévu à l’article 234 quinquies du CGI.

 

Le contribuable en question souscrit par voie électronique, dans le délai de 30 jours suivant la date du compromis de vente, ladite demande accompagnée des pièces justificatives relatives à la détermination de l’impôt. Cette demande fait ressortir les éléments suivants :

 

- Prix de cession : ...................................................................................................... 900 000 DH

- Prix d’acquisition augmenté des frais d’acquisition et réévalué :................................. 700 000 DH

 

Détermination du profit imposable et de l’IR correspondant :

 

- Profit imposable : 900 000 - 700 000 =................................................................. 200 000 DH

- IR : 200 000 x 20 % =....................................................................................... 40 000 DH

- Cotisation minimale : 900 000 x 3 % =................................................................ 27 000 DH

- Montant de l’IR/PF dû : ..................................................................................... 40 000 DH

 

Suite au dépôt de cette demande, l’administration a communiqué au demandeur son avis valant attestation de liquidation de l’impôt, dans le délai de 60 jours suivant la date de la réception de la demande précitée. Cette réponse fait ressortir les éléments suivants :

 

- Prix de cession retenu par l’administration................................................... 1 000 000 DH

- Prix d’acquisition augmenté des frais d’acquisition et réévalué :                                   700 000 DH

- Profit imposable retenu : 1 000 000 - 700 000 =............................................ 300 000 DH

- IR/PF : 300 000 x 20 % =.......................................................................................... 60 000 DH

- Cotisation minimale : 1 000 000 x 3 % =.................................................................... 30 000 DH

 

- Montant de l’IR/PF dû : 60 000 DH

 

Après la réalisation de la cession, le contribuable est tenu de souscrire sa déclaration des profits immobiliers prévue à l’article 83 du CGI, dans les 30 jours qui suivent la date de la cession et de verser en même temps l’impôt dû, conformément aux dispositions de l’article 173-I du CGI.

 

Cas n°1 : Le contribuable souscrit sa déclaration et procède au paiement de l’impôt sur la base des éléments de l’attestation de liquidation précitée :

 

Dans ce cas, le contribuable, ayant souscrit sa déclaration et ayant procédé au paiement de l’impôt sur la base des éléments de l’attestation de liquidation précitée, sera dispensé du contrôle fiscal en matière d’IR/PF prévu à l’article 224 du CGI.

 

Cas n°2 : Le contribuable souscrit sa déclaration sans prendre en considération les éléments de l’attestation de liquidation précitée :

 

Dans ce cas, il est tenu de verser, à titre provisoire, auprès du receveur de l’administration fiscale la différence entre le montant de l’impôt déclaré et 5% du prix de cession, soit :

 

Montant de l’impôt déclaré : .......................................................................................  40 000 DH

5% du prix de cession : 900 000 x 5%:......................................................................... 45 000 DH

Différence entre 5% du prix de cession et le montant de l’impôt déclaré :

45 000 – 40 000 =                                          5 000 DH

 

Total à verser : 40 000 + 5 000 =.......................................................................... 45 000 DH

 

Il est à signaler que le versement du montant de 5% du prix de cession ne libère pas le contribuable qui peut faire l’objet de la procédure de rectification prévue en matière de profits fonciers par l’article 224 précité.

 

Exemple 2 : Contribuable n’ayant pas demandé l’avis préalable de l’administration fiscale en matière d’IR/PF

 

Cas n°1 : L’impôt déclaré est inférieur à 5% du prix de cession

 

Un contribuable a cédé le 15 juillet 2023 un bien immeuble au prix de 2 000 000 DH. Le prix d’acquisition de ce bien, augmenté des frais d’acquisition et des dépenses d’investissement et réévalué selon le coefficient correspondant, est de 1 900 000 DH.

 

Cette opération de cession n’est pas exonérée de l’IR et le contribuable n’a pas demandé l’avis préalable de l’administration fiscale.

 

- Calcul d’IR/PF :

 

* Profit foncier imposable : 2 000 000 – 1 900 000 : ..........................................  100 000 DH

* Cotisation minimale : 2 000 000 x 3% :.............................................................. 60 000 DH

* IR/PF calculé au taux de 20% : 100 000 x 20% .................................................. 20 000 DH

Ainsi, le montant de l’IR/PF dû est de 60 000 DH du fait que la CM est la plus élevée.

 

- Calcul de 5% du prix de cession :

2 000 000 x 5%:.......................................................................................... 100 000 DH

 

- Montant de l’impôt à verser :

 

* Montant de l’IR/PF déclaré : .................................................................................... 60 000 DH

* Différence entre 5% du prix de cession et le montant de l’IR/PF dû:

100 000 – 60 000 =........................................................................................... 40 000 DH

* Total à verser: 60 000 DH + 40 000 DH=........................................................ 100 000 DH

 

- Procédure de rectification ayant abouti à des droits complémentaires :

 

Suite à un contrôle effectué dans le cadre de la procédure prévue par les dispositions de l’article 224 du CGI, l’administration a remis en cause le prix de cession déclaré dans l’acte. La procédure de contrôle a abouti à une rectification du prix de cession déclaré et accepté par le contribuable pour un montant de 2 500 000 DH.

 

Calcul des droits complémentaires :

 

Profit imposable suite à rectification : 2 500 000 – 1 900 000 =                             600 000 DH

- IR/PF: 600 000 x 20 % =............................................................................................ 120 000 DH

- CM calculée sur la base du prix de cession rectifié : 2 500 000 x 3% = ... 75 000 DH - Le montant de l’IR/PF (l’IR/PF étant supérieur à la CM)...120 000 DH

- Le montant de l’IR déclaré initialement........................................................................ 60 000 DH

- Le montant de l’IR complémentaire : 120 000 - 60 000 =........................................... 60 000 DH

- Le montant de la différence entre 5% du prix de cession

et le montant de l’IR/PF dû : ........................................................................................ 40 000 DH

- Le montant de l’IR complémentaire à verser : 60 000 - 40 000 =................................... 20 000 DH

 

- Procédure de rectification ayant abouti à une restitution :

 

Supposons que, pour le même cas d’illustration, l’administration ait procédé à la rectification des dépenses d’investissement déclarées.

 

Profit imposable suite à cette rectification est de 400 000 DH au lieu de 100 000 DH

 

Calcul des droits correspondants :

 

IR calculé : 400 000 x 20 %

=80 000 DH

Montant de la CM : 2 000 000 x 3%

=60 000 DH

- Le montant de l’IR/PF dû (l’IR/PF étant supérieur à la CM)

80 000 DH

- Le montant de l’IR/PF déclaré initialement

60 000 DH

- Le montant de l’IR/PF complémentaire : 80 000 - 60 000

=20 000 DH

- Le montant de la différence entre 5% du prix de cession

 

et le montant de l’IR/PF dû :

40 000 DH

 

Dans ce cas, le montant versé à titre provisoire (la différence entre le montant de l’impôt déclaré et 5% du prix de cession) est supérieur au montant de l’IR/PF complémentaire dû.

 

Le reliquat du montant versé à titre provisoire, après déduction du montant de l’impôt complémentaire dû, est restitué d’office au contribuable concerné, soit :

 

Le montant à restituer : 40 000 – 20 000 =......................................................... 20 000 DH

 

Cas n°2 : L’impôt déclaré est supérieur à 5% du prix de cession

 

Un contribuable a cédé le 15 octobre 2023 un bien immeuble au prix de 2 200 000 DH. Le prix d’acquisition de ce bien, augmenté des frais d’acquisition et réévalué, selon le coefficient correspondant, est de 1 400 000 DH.

 

Cette opération de cession n’est pas exonérée de l’IR et le contribuable n’a pas demandé l’avis préalable de l’administration fiscale.

 

Lors de la souscription de la déclaration, le contribuable concerné devra verser l’IR/PF comme suit :

 

* Profit foncier imposable : 2 200 000 – 1 400 000 :

800 000 DH

* Cotisation minimale :  2 200 000 x 3% :

66 000 DH

* IR/PF calculé au taux de 20% : 800 000 DH x 20%

160 000 DH

* IR/PF dû : (IR/PF calculé au taux de 20% est supérieur à la CM)

160 000 DH

* 5% du prix de cession : 2 200 000 x 5% :

160 000 DH

 

Vu que le montant de l’IR/PF dû (160 000 DH) est supérieur à 5% du prix de cession (110 000 DH), le montant de l’impôt à verser, dans ce cas, est de 160 000 DH.